mardi 15 octobre 2013

Demi-marathon des Couleurs (DNF)

Je ne suis pas particulièrement fière de l'histoire que je vais vous raconter. Je suis retombée un peu dans un pattern que je connais trop. Je vais tout de même l'écrire pour apprendre de mes erreurs. Et parce que l'écriture a un côté thérapeutique pour moi.


Depuis mon dernier triathlon à Valleyfield à la fin août, j'avais expliqué ici que je préparais un demi-marathon. Ce fût une belle période d'entraînement. Je courais sans douleur. Et aussi, je courais longtemps, chose que je n'avais jamais connu. La météo superbe des dernières semaines ajoutait au plaisir. La carrosserie tenait bon. Semaine après semaine, je me surprenais à augmenter la longue sortie et le kilométrage cumulatif hebdomadaire. La préparation de ce demi demeurera un bon souvenir. Même si de temps à autre, je trouvais que je poussais un peu ma luck...

La semaine dernière, une lumière jaune s'est allumée durant un entraînement facile. Un petit pincement sur le côté du genou droit. J'ai continué, le pincement est disparu. Le dimanche précédent le demi, une lumière rouge s'est mise à flasher durant ma dernière longue sortie. C'était plus qu'un pincement. J'ai pensé arrêter et retourner sagement à la maison mais je portais mes lunettes d'endorphines (mes lunettes de droguée) alors la lumière n'était pas si crue, si aveuglante. Avec un peu de marche, de course facile, j'ai pu faire l'entraînement. Sauf qu'à la fin, je savais que quelque chose ne tournait pas rond.

S'en est suivie une montagne russe de questionnements durant la semaine sur ma participation au demi-marathon et deux traitements chez mon chiro. Mardi, je devais tester la papate avec un petit 5 k de course facile. J'ai couru 2k et j'ai arrêté, sentant l'inconfort arriver. Après cet essai très peu concluant, c'était clair pour moi qu'il n'y avait pas de demi. Puis, deux jours plus tard, Chiro avait suggéré un autre test. J'ai alors réussi à faire 7 k sous le beau soleil d'automne, sans vraiment d'inconfort. Un autre traitement le lendemain. Chiro ne me garantit pas que je ne vais pas sentir ma bandelette.

A la lumière de cet essai plutôt positif, j'ai alors reconsidéré ma décision. Il y avait un risque, soit. Mais je croyais sincèrement que ce risque était raisonnable. Je suis donc allée chercher mon dossard le samedi et me suis préparée pour la course du lendemain. Ce qu'il y a de bien avec ces montagnes russes sur la participation à une course, c'est que lorsque la vie nous donne une p'tite chance d'y participer, on la remercie et on en profite vraiment.

Au moment du départ, j'étais très confiante. Je n'avais pas de doute, je ne me questionnais pas à savoir si je devais être là ou non. Je savais qu'il y avait un risque mais mon pif me disait qu'il n'était pas assez élevé pour que je ne m'essaie pas. Mon objectif en était un de temps. Malgré le début de blessure, je ne voulais pas finir ce demi, je voulais faire le temps prévu. Et dans mon for intérieur, je savais que je devais prendre l'accotement en cas de douleur trop intense.

J'étais survoltée au départ, j'ai vraiment eu un beau rush d'adrénaline. La superbe température, le beau parcours, mes jambes qui roulaient super bien, qui accéléraient sur demande, la papate qui suivait, j'avais de bonnes sensations. Je crois que cette distance est pour moi, j'adore courir à ce rythme assez soutenu mais moins qu'un 5 k ou 10 k. Je tentais de trouver une partie d'accotement au niveau pour ne pas surcharger ma bandelette. Pas évident. La bonheur a pris un peu l'bord au km 4 où les premiers signes sont de douleur apparus. Gérables, ils étaient gérables.

Alors j'ai continué, encore une fois confiante que je pouvais passer à travers, que le jeu en valait la chandelle. Au km 9 environ, on quittait l'asphalte pour entrer dans un secteur boisé en poussière de roches. Le sentier se faufilait à travers la forêt. Magnifique avec les couleurs d'automne. Mais avec une bandelette irritée, c'est le genre de terrain qui fait mal, parce qu'irrégulier. Ensuite, pour reprendre l'asphalte du quartier résidentiel, les coureurs franchissaient une distance d'environ 20-30 m sur une surface gazonnée, assez instable. Ayoye, la B n'a pas aimé pantoute. Ce fût le début de la fin.

J'avais mal mais l'espoir était encore là!

Une fois franchie cette section, la douleur était vive. On compare souvent la douleur du syndrôme de la bandelette illio-tibiale à un couteau inséré dans le côté du genou. Le couteau m'empêchait de plier le genou, je n'étais plus capable de tolérer la douleur alors j'ai marché un peu, 10-20 m, je ne sais plus. J'avais franchi 10 k. Il me restait une boucle à faire. Mon temps était super bon, vraiment meilleur que celui prévu. Je me suis bottée le derrière. Allez, essaie. Continue un peu.

Je suis repartie à courir. J'ai revu des coureurs que j'avais déjà dépassé. Au km 13 environ, pas très loin de la maison d'un collègue, ça faisait vraiment mal. J'ai arrêté. J'ai marché un peu. J'ai essayé de reprendre. Peine perdue. La jambe ne suivait plus. Elle ne pliait plus. La course était impossible.

J'ai sangloté. J'ai regardé les coureurs défiler devant moi. Il y en avait beaucoup. Un de ceux-ci a ralenti, m'a demandé si ça allait. C'était un beau geste mais oui, ça allait. J'avais le coeur en mille miettes mais il n'y avait rien de si grave. J'ai marché vers la maison de mon collègue en essuyant quelques larmes. Il était à l'extérieur avec sa femme. Je lui ai demandé de venir me mener au point de départ. Il a compris que ça n'allait vraiment pas. Ce n'était qu'à environ 3-4 km, mais je n'avais pas du tout envie de les parcourir à pied en sens inverse.

Une fois déposée près du site principal, j'ai retiré mon dossard. Je suis allée ramasser mes choses que j'avais cachées derrière un stand. Je pleurais de rage. C'est la première fois que je ne complète pas une épreuve. Et le comble, c'est que ma bandelette était tendue et irritée. Ce qui n'était qu'un début de blessure s'était transformé en blessure en bonne et due forme. J'entendais la musique, les cris des gens, je voyais les coureurs du 10 k qui avaient terminé leur course, sourire aux lèvres. En boitant légèrement, j'ai tout de suite quitté le site. Avec un couteau dans le genou et un autre qui me vrillait dans la plaie du DNF, je suis retournée à ma voiture, à ma maison.

J'avais de la famille qui m'attendait alors je n'ai pas eu trop le temps d'être triste. J'ai vu ma fille, elle m'a demandé comment la course s'était déroulée. Mal...je n'ai pas fini. 

Elle m'a rappelé que c'était comme son championnat. En février 2012, ma fille s'était fracturée le poignet et n'avait pu se qualifier en solo pour le championnat québécois de nage synchro. Pas besoin de vous dire que cette année, elle avait le couteau din dents. Elle voulait se qualifier et un podium était même envisageable. Elle s'était donc qualifiée. Mais le matin même de la compétition, elle toussait beaucoup. En fait, elle toussait depuis quelques jours et ne feelait pas. Rien de grave, un virus...Mais avec la nervosité, la toux, le sirop, elle a vomi devant tout le monde sur le bord de la piscine (gênant pour elle, vous dites ?) et n'a pas pu faire son solo. Elle a trouvé ça dur. Elle a pleuré. Mais elle s'est retroussée les manches et a réalisé une belle performance avec sa duette et  son équipe dans les heures qui ont suivi.

Oui, de réfléchir à cet événement m'a fait réaliser que ma p'tite mésaventure n'était pas grand-chose. Ce n'était pas la compétition la plus importante de ma saison même si elle revêtait une signification particulière. En fait, j'ai fait beaucoup d'efforts pour m'améliorer cette année, pour être plus raisonnable. Je voulais une saison sans blessures. La participation à ce demi-marathon me donnait l'impression de pouvoir tourner la page, me donnait l'occasion de me prouver à moi-même qu'en faisant les choses intelligemment, je n'étais pas condamnée aux courtes distances de triathlon. Et juste au moment où cet objectif se concrétisait, je me suis enfargée.

La douleur à la B a été lancinante le lendemain de la course mais aujourd'hui, ça va beaucoup mieux. Je peux marcher sans boiter, ce qui m'encourage. Plusieurs personnes m'ont écrit et dit des beaux mots d'encouragement et j'ai apprécié ces attentions. Je me rends compte que le pire n'est pas pas le DNF (c'est derrière moi) mais bien la blessure et le questionnement sur le retour. Vais-je traîner cette blessure ou guérira-t-elle rapidement et sans séquelle ?

Pas trouvé de photos de pieds sur
une bavette de poêle! 
On ne peut le savoir, on ne peut le prédire. Chaque chose en son temps, ma chouette. Et là, il est temps de profiter de mon congé annuel bien mérité. De me pogner le beigne. D'écouter la télé le soir. De boire du vin (excellente idée, je vais me verser un verre tout de suite). De faire plaisir à ma fille en décorant sa chambre. De faire le ménage dans mes trucs de triathlon. De prendre un rendez-vous chez la nutritionniste et avec Daniel pour me faire positionner sur mon vélo de route d'intérieur. D'essayer des nouvelles recettes. De yogater (un terme inventé dans ma demeure pour remplacer faire du yoga). D'écrire les milles et uns billets que j'ai en tête.

Je pense que vous avez compris le principe, n'est-ce pas ? 

2 commentaires:

Unknown a dit…

Isa,

Te lire me fais tellement de bien.Tu es inspirante et incroyablement forte.Tu as su prendre la bonne décision.
Malheureusement il semble que je n'ai pas ta sagesse.Je devrais apprendre mais nous les triathlètes nous poussons souvent au delà de nos limites. Je vis présentement la même chose...vais je faire le demi..je ne sais pas. Je verrai mais tu me fais réfléchir et je t'en remerçie.
Amitiés,
Sylvie

Anonyme a dit…

Ce billet m'a fait monter les larmes aux yeux. Même quand je l'ai relu une deuxième fois, puis une troisième... On s'identifie à certains athlètes et à certaines situations qu'ils vivent. C'est comme ça. Comment ça va maintenant? Est-ce que la bandelette rouspète encore? Et le moral, lui, il tient le coup?